Le projet Un Printemps en sol mineur a été présenté au public dans les rues de Rouyn-Noranda et sur les réseaux sociaux au printemps 2021. L’objectif du projet était de permettre aux musiciens du Centre musical En sol mineur de se produire en public sans avoir à se restreindre aux contraintes des salles de spectacle mais aussi de s’ouvrir à l’univers numérique et à stimuler et valoriser la pratique musicale.

Concrètement, des performances musicales regroupant élèves, ancien·nes élèves, et professeur·es ont été filmées puis diffusées en mapping dans les fenêtres de trois édifices du centre-ville de Rouyn-Noranda. À partir de ces prestations publiques, des clips vidéos ont été réalisés en diffusés sur les médias sociaux.

Nous avons effectué un travail de compilation des bons coups et des mauvais coups sur la technique et le numérique pour ce projet et nous en avons tiré quelques apprentissages: 

1. Projeter dans des fenêtres

Pour plusieurs raisons (temps imparti, budget), nous ne pouvions pas faire de projections architecturales de grande envergure comme il est courant de le voir aujourd’hui. Plusieurs possibilités s’offraient à nous mais nous avons fait le choix de projeter sur trois commerces du centre-ville de Rouyn-Noranda et d’utiliser les fenêtres de ces bâtiments comme zone de projection.

Le fait de se limiter aux fenêtres donne plusieurs avantages : 

• Les fenêtres étant considérablement plus petites qu’une façade de bâtiment, nous n’avions pas besoin de projecteur dits « professionnels » avec des caractéristiques haut de gamme. Les projecteurs disponibles au Petit Théâtre étaient suffisants.
• Les fenêtres étant un support transparent, cela permettait de jouer avec la rétroprojection et donc de pouvoir mettre les projecteurs à l’intérieur du bâtiment. On évite ainsi d’utiliser des boîtes protectrices, d’avoir des coûts reliés à l’alimentation et les projecteurs sont à l’abri.
• La projection dans les trois fenêtres unifie les trois lieux de projection et donne un sentiment d’intimité. Aussi, la projection dans des fenêtres ancre davantage l’image projetée dans le bâtiment et donne plus de relief que la projection sur une façade.

 Bien entendu, le fait de projeter dans la fenêtre amène aussi son lot de défis : 

• La vitre étant un matériau transparent, elle laisse passer la lumière. Il fallait donc trouver un matériau facile à installer sur la vitre, et permettant de la rendre translucide et non transparente. Pour cela nous avons utilisé des feuilles de papier vélin, que nous avons placées dans les fenêtres. Ainsi, il était possible de projeter depuis l’intérieur du bâtiment et d’observer la projection depuis l’extérieur.
• En disposant les projecteurs dans les salles et en utilisant la rétro projection, il fallait vraiment faire attention à l’ombre car tout élément ou personne qui passe entre le projecteur et l’écran crée une ombre sur l’écran (ici la fenêtre). De plus, les projecteurs étant placés dans des lieux publics, leur emplacement ne devait gêner ni les clients ni les travailleurs tout en assurant une qualité maximum pour l’image.

2. Adapter le média diffusé au format de la fenêtre

Les baies vitrées dans lesquelles étaient projetées les images n’étaient pas toutes de la même taille et étaient parfois séparées en plusieurs parties par des montants. Il fallait donc adapter l’image à la structure des fenêtres pour que la projection soit idéale.

Les standards de vidéo sont le 16:9, le 4:3 ou le 16:10. Tous ces formats correspondent à des ratios de hauteur par rapport à la largeur (on en parle pour les écrans d’ordinateur, les téléviseurs, l’écran de cinéma, etc.).

Dans le cadre d’une projection architecturale, le format de l’image n’est plus standard car la vidéo doit s’adapter à une surface. La première étape d’un mapping, après avoir choisi le lieu, consiste à faire les masques. Les masques sont pour le mapping, ce qu’est le patron pour la couture. C’est grâce à eux que les images projetées épousent parfaitement les contours de la surface de projection. On peut ainsi créer des illusions et des jeux de montages.

Voici les étapes pour créer un masque :

1. Prendre les mesures des fenêtres et de leurs positions les unes par rapport aux autres.
2. Convertir avec une simple règle de trois les dimensions prises (en mètre ou en pied) en pixels. 
3. Sur un logiciel de dessin par ordinateur (exemple : Illustrator, Gimp, Photoshop) faire les masques (patron) qui serviront aussi au monteur pour créer ses visuels.

Il est intéressant d’utiliser le format de la surface de projection pour créer des jeux de montage. Les carreaux des fenêtres sont propices aux effets de mosaïques par exemple.

3. Faire démarrer trois projections de manière simultanée

Comme expliqué plus tôt, trois lieux avaient été sélectionnés dans la ville pour recevoir les projections. Pour donner une impression d’unicité et de magie, nous avons fait en sorte que les 3 lieux démarrent en même temps, à une heure précise (à la tombée de la nuit). De plus, pour éviter d’avoir trois techniciens vidéo qui démarrent les projections avec un simple « on et off » nous avons décidé d’automatiser le démarrage des œuvres.

Pour cela nous avons utilisé plusieurs outils :  

• Le planificateur de tâches (Task Manager) sur Windows : permet d’allumer et d’éteindre l’ordinateur à des heures précises. Cet outil permet aussi d’effectuer des tâches spécifiques en fonction de facteurs prédéterminés. Par exemple : allumer le projecteur à X heure, lancer le média à Y heure.
• Les protocoles de communication PJlink : ils sont fournis avec la plupart des projecteurs et permettent de les contrôler comme une télécommande.
• Le protocole de communication OSC : permet d’envoyer des commandes au logiciel de mapping (ici MadMapper) et ainsi lancer le média dédié.

 Voici un exemple de déroulé la programmation dans Task Manager :

• 7h50 : allumer ordinateur
• Une fois l’ordinateur allumé : démarrer le logiciel de mapping MadMapper
• 7h55 : allumer le projecteur avec une commande PJlink
• 8h00 : Lancer le média avec une commande OSC
• 23h30 : Couper le média
• 23h35 : éteindre le projecteur
• 23h40 : éteindre l’ordinateur

 Pour plus d’information suivre le procédurier.

4. Diffuser du son en extérieur 

La dernière contrainte à laquelle nous avons fait face dans ce projet était de diffuser du son en extérieur. En effet, les mappings étaient évidemment accompagnés de son, puisqu’ils mettaient en scène des musicien·nes. Il fallait donc installer des enceintes à l’extérieur. Nous avons utilisé des enceintes avec un boîtier IP6X. Ce code signifie que le boîtier est étanche à la poussière et peut avoir différents degrés de protection contre l’eau. En ce qui concerne la connexion des fils, l’idéal est de les faire passer par des trous conçus à cet effet mais dans notre cas, il a fallu les faire passer par les fenêtres.

Petit pense-bête :

• récupérer les clés des lieux

• vérifier qu’ils sont équipés d’une connexion internet

• Installer un VPN pour avoir accès aux ordinateurs qui sont dans les bâtiments, sans avoir à y entrer

• Prévoir un emplacement idéal pour les spectateur·rices à l’extérieur et le marquer